10-Oeuvres de Saint Francois de Sales-Tome X-Vol.4-Sermons.html |
A010000429 |
Ce mystere nous est bien representé par les cierges que nous portons à ce jour, auxquels se trouvent trois natures fort differentes l'une de l'autre, qui neanmoins sont tellement jointes et unies par ensemble qu'elles ne [165] font qu'un cierge: à sçavoir, la nature du feu, la nature de la meche ou luminon, et celle de la cire. |
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L'homme est donc en quelque façon double, et tout ainsy que le corps a besoin d'estre uni à l'ame pour devenir lumineux, aussi l'ame, par une certaine correspondance, recherche cette union qui luy est necessaire; de mesme que le luminon a besoin d'estre uni à la cire pour esclairer, et qu'il faut esgalement que la cire soit jointe au luminon ou à la meche pour rendre de la clarté. |
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La nature du luminon est sans doute plus noble que celle de la cire, car les luminons sont faits pour l'ordinaire de coton, lequel croist sur des arbres grandement hauts; au contraire, chacun sçait que la cire est recueillie comme le miel par les avettes dans les fleurs qui mi sur la terre. |
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La seconde nature du cierge est celle du luminon, qui figure la nature de l'ame de Nostre Seigneur. |
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Le luminon joint à la cire et au feu respand une lumiere excellente; mais si on vient à le joindre au feu sans qu'il soit uni à la cire, il ne jettera que de la fumée ou une flamme tout obscure. |
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Or, quoy que, [167] comme nous l'avons dit, la nature de la cire et celle du luminon soyent bien differentes l'une de l'autre, l'une venant de la terre et estant façonnée par les avettes, l'autre croissant sur de grans arbres sans avoir besoin de l'industrie d'aucune creature pour le façonner, ayant esté fait tel qu'il est par le Createur mesme, neanmoins ces deux natures sont tellement unies et meslangées l'une dans l'autre ès cierges que nous portons, qu'elles ne font qu'un seul cierge, ce qui certes est admirable.. |
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Or, bien que l'ame et le corps soyent si differens l'un de l'autre, ils ne font neanmoins qu'une personne que nous appelions homme; voire mesme ils viennent à faire un tel meslange par cette union et jonction, que nous parlons des deux comme s'il n'y en avoit qu'un; tout ainsy que quand on parle de la bonté, beauté, ou telle autre qualité du cierge on ne distingue pas la cire ni le luminon, ains on dit seulement et en un mot: Ce cierge est beau ou bon, parlant des deux natures qui se trouvent en luy comme s'il n'y en avoit qu'une seule. |
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Cecy nous est grandement bien representé par la subtilité avec laquelle le feu se prend au luminon et à la cire, car bien qu'il s'attache en premier lieu au luminon, il se trouve cependant au mesme instant uni à la cire.. |
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En l'Incarnation, le feu de la Divinité voulant s'unir à la nature humaine pour la rendre toute lumineuse, il commença premierement à se joindre au luminon, c'est à sçavoir à l'ame de Nostre Seigneur. |
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Le feu estant mis au cierge pour l'allumer, il se prend [168] plus tost au luminon qu'à la cire; peut estre est-ce parce sa nature est plus noble que celle de la cire, et par consequent plus propre à se joindre la premiere à celledu feu. |
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Mais quand je dis qu'il commença premierement à se joindre à son ame, representée par le luminon, il ne le faudroit pas entendre en telle sorte que nous voulant esclaircir sur ce mystere de l'Incarnation, nous nous trompassions nous mesmes. |